Monsieur le Maire,
Notre association qui dispose d’un agrément au titre de la protection de l’environnement, au sens de l’article L. 252-1 du Code rural, a l’honneur de former un recours gracieux, visant au retrait pour illégalité, de la délibération du Conseil municipal de l’Épine du 18 juillet 2006, affichée le 8 août 2006 approuvant son Plan local d’Urbanisme.
Cette délibération nous paraît en effet, entachée de nombreux vices affectant aussi bien sa légalité interne que sa légalité externe.
1. VIOLATIONS DE LA LÉGALITÉ EXTERNE
En ce qui concerne le rapport du commissaire enquêteur :
1. 1. Les réserves ne sont pas clairement énoncées :
– Dans le paragraphe 32, observations des personnes publiques associées, au sous-paragraphe 328, association Vivre l’île 12 sur 12, il écrit : « Elle émet plusieurs observations concernant la gestion des ressources naturelles, la protection de l’eau, la gestion de l ‘énergie (panneaux solaires) et fait des propositions quant à la préservation et la valorisation des espaces naturels. Propositions qu’il conviendra de prendre en considération dans le document définitif. ».
– Au chapitre IV, Conclusions et avis, le commissaire enquêteur donne un avis favorable, « sous réserve d’une stricte application des avis émis par les personnes publiques associées ».
Les avis des personnes publiques associées, d’après lui, comprennent celles de l’association “Vivre l’île 12 sur 12“ qui avait observé l’absence de traitement de la capacité d’accueil, mais aussi bien sûr, celles du Préfet de la Vendée qui, dans sa lettre du 28 février 2006, écrivait :
« La commune de l’Épine est une commune littorale au sens de l’art. 2 de la loi du 3 janvier 1986 dite loi “littoral“. À ce titre le rapport de présentation ne comporte pas tous les éléments précisés aux articles R 123-1 et R 123-2 du code de l’urbanisme. Il doit notamment prendre en compte la loi du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral et plus particulièrement les dispositions de la loi “littoral“ contenues dans les articles L 146-1 à L 146-9.
La capacité d’accueil des espaces urbanisés ou à urbaniser (art. L 146-2 du CU) :
Cette disposition de la loi vise à définir le projet de développement de la commune en fonction des objectifs de préservation et de protection des espaces nécessaires aux autres modes d’utilisation des sols et des contraintes liées à la capacité des différents réseaux structurants. Cette capacité des équipements publics intercommunaux (traitement des eaux usées et des déchets) est évoquée mais ne précise pas les possibilités réservées à la commune en fonction du développement des collectivités voisines. »
1.2. Une observation importante du public n’a pas été prise en considération :
Nous avons argumenté notre propos sur la capacité d’accueil dans la lettre que nous avons remise au Commissaire enquêteur, vous retrouverez cette argumentation en annexe 1.
Nous n’avons retrouvé dans le rapport du commissaire enquêteur aucune réponse ni même aucune mention de cette illégalité ; or, l’article 20 du décret n° 85-453 du 23 avril 1985 précise :
« Le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l’enquête et examine les observations recueillies. »
Dans le cas de cette enquête, le commissaire enquêteur n’a pas examiné dans son rapport notre observation relative à la capacité d’accueil.
1. 3. En ce qui concerne la zone 2AUe : nous avions observé dans notre déposition :
« 2,2 ha de la zone aquacole de l’ancien POS forment maintenant une zone 2AUe. Cette zone est destinée à accueillir des commerces, il paraîtrait que les marais qui forment cette zone n’ont plus de lien avec le réseau hydraulique ! Cependant les caractères morphologiques, hydrauliques et patrimoniaux de cette zone l’identifient à une zone Nds.
Parallèlement le PLU affiche le souci de préserver la qualité des entrées de ville. Il semble paradoxal de faciliter l’agrandissement d’une grande surface commerciale à l’entrée Nord de la commune. Le souci de développement des commerces dans ou à proximité du bourg semble d’ailleurs oublié. »
Dans le cas de cette enquête le commissaire enquêteur n’a pas examiné notre observation vis-à-vis de cette zone 2AUe.
Il se borne à écrire de façon erronée :
« D’autre part, toujours en ce qui concerne cette zone, et contrairement à ce qui est écrit dans la lettre du 28 février 2006 adressée au Maire de l’Épine par l’association “Vivre l’île 12 sur 12“ (page 4), l’épaisseur d’argile se situe entre 3 et 5m (doc SMAM Île de Noirmoutier, 5 mai 2006) et rend donc cette zone constructible après aménagement. »
Le commissaire enquêteur a visiblement mal situé la zone 2AUe sur ladite carte, il a confondu avec la zone commerciale existante.
2. VIOLATIONS DE LA LÉGALITÉ INTERNE
2. 1. La capacité d’accueil : Le 27 juillet 2004, le Président du Tribunal Administratif de Nantes, dans les considérants précédant l’annulation du PLU de l’île d’Yeu, énonçait notamment :
« Considérant qu’aux termes de l’article L. 146-2 du code de l’urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date à laquelle est intervenue la délibération attaquée : « Pour déterminer la capacité d’accueil des espaces urbanisés ou à urbaniser, les documents d’urbanisme doivent tenir compte :
– De la préservation des espaces et milieux mentionnés à l’article L. 146-6 ;
– De la protection nécessaire au maintien ou au développement des activités agricoles, pastorales, forestières et maritimes ;
– Des conditions de fréquentation par le public des espaces naturels, du rivage et des équipements qui y sont liés. Dans les espaces urbanisés, ces dispositions ne font pas obstacle à la réalisation des opérations de rénovation des quartiers ou de réhabilitation de l’habitat existant ainsi qu’à l’amélioration, l’extension et la reconstruction des constructions existantes. Les schémas directeurs et les plans d’occupation des sols doivent prévoir des espaces naturels présentant le caractère de coupure d’urbanisation. »
Dans le cas du PLU de l’Épine, les conditions de fréquentation par le public des espaces naturels, du rivage et des équipements qui y sont liés, n’ont pas été pris en compte.
De plus, comme l’ont souligné les services préfectoraux « Cette capacité des équipements publics intercommunaux (traitement des eaux usées et des déchets) est évoquée mais ne précise pas les possibilités réservées à la commune en fonction du développement des collectivités voisines. »
Dans le cas du PLU de la commune de l’Épine, les données en ce qui concerne l’assainissement sont plus que vagues: seule la population estivale totale de l’île est estimée (sans préciser le mode d’estimation, il y a deux ans une estimation faite à partir du volume des déchets ménagers était nettement supérieure).
La notion de capacité d’accueil, pourtant exigée par la loi, a été escamotée, elle avait fait pourtant fait l’objet de plusieurs recommandations dans le porté à connaissance en référence à la loi littoral. Aucune recherche, aucune estimation, aucune enquête n’ont été faites sur ce sujet.
2.2. La zone 2AUe : Le rapport de présentation (page 5) présente cette zone ainsi : « cette extension se positionne (…) sur un terrain dont la communication hydraulique avec les espaces de marais a été rompue par les voies routières ».
C’est faux, le marais actuellement en friche, cadastré n° 1250 et 1251 et ses attenants hydrauliques n° 178, 1252, 1253, 1254,1255, est toujours rattaché au circuit hydraulique d’alimentation en eau salée et se remplit naturellement lors des forts coefficients comme le prouvent de nombreuses photographies.
De plus c’est sur cette zone que l’on trouve les réserves hydrauliques du marais du grand Porteau (cadastré n° 146 et classé en Nds). Ce marais perdrait donc sa cohérence hydraulique.
Cette zone, sur le territoire de l’Épine, est pourtant assimilée au paysage urbain de Noirmoutier-en-l’île car elle est accolée à son entrée. Située sur un axe touristique majeur de l’île, exposée à toute la population entrant et sortant de la principale commune de l’île, cette zone de marais sacrifiée à un projet commercial tapageur constituerait un précédent dangereux : le marais ne serait plus sanctuarisé mais deviendrait le possible point d’accueil de toute urbanisation.
L’association “Vivre l’île 12 sur 12“ vous prie donc de bien vouloir réexaminer le Plan local d’urbanisme de la commune de l’Épine et de bien vouloir donner une suite positive au présent recours gracieux en modifiant ce PLU tant en ce qui concerne l’étude de la capacité d’accueil de la commune qu ‘en ce qui concerne la création de la zone 2AUe
Le présent recours gracieux exercé dans les délais est recevable. L’association précitée, de par son objet social, a qualité et intérêt à agir en ce qui concerne le PLU précité. De plus amples précisions à propos du présent recours gracieux que nous nous réservons, par ailleurs, de compléter ultérieurement pourront vous être fournies.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Maire, l’assurance de notre considération distinguée.
La Présidente, Marie-Thérèse Beauchêne
Copie : Monsieur le Préfet de la Vendée
Madame la Directrice Régionale de l’Environnement
Monsieur le Président de la Communauté de Communes de l’île de Noirmoutier